un parfum d'aventure, dans les eaux de l'antarctique

Je pars en Antarctique pour un peu plus d'un an, plus exactement en Terre Adélie, à Dumont d'Urville avec l'IPEV (Institut Paul Emile-Victor). Dumont d'Urville est une base de recherche polaire française, située en dessous de la Tasmanie. Mon rôle sera d'étudier les poissons et les organismes qui vivent sur le fond, en dessous de la banquise.

samedi 11 juin 2011

Rendez-vous au trou maudit,

Vous avez déjà entendu parler des maisons hantées ? Des personnes apportant la malchance avec eux ? De ces endroits où si vous y allez seul, des ennuis en ressortiront ? Ces endroits, qui vous font peur et que même, non superstitieux que vous êtes, vous évitez. Le moindre problème, qui vous arrive par la suite, ne peut qu’être la cause de cette visite, cette visite que vous n’auriez jamais dû réaliser.

La base n’est pas hantée, seulement par le souffle du vent durant la nuit. Tu t’enroules sous la couette et l’écoutes siffler. Tu l’écoutes siffler dans les bergs, il résonne à travers la glace, fait vibrer les cristaux de glace. Le vent souffle aussi tout autour du coffrage bois. Il est bien hanté par un phoque, mais celui-ci est bien vivant. Il a eu beau me faire peur de multiples fois, il n’a pas l’air d’un monstre ou en tout cas pas d’un léopard des mers. Mais le trou de pêche est maudit d’après notre mécanicien, Justin...


Vous ne nous croyez pas ? Je vais vous raconter l’histoire de cette journée qui lui a apporté ce joli petit surnom....

Voilà un peu plus de deux semaines, si mes souvenirs sont exacts (j’ai mis du temps à rassembler les photos), et je m’en allais au trou de pêche pour mettre BébéROV à l’eau, accompagné d’Arnaud, mon sous-VCAT bébéROV. La journée avait commencé de très bonne heure (mais pas trop) afin que tout soit fin près pour partir au lever du soleil. Aucune minute n’est à perdre en cette période de l’année où la lumière n’est que passagère. Justin avait prévu de nous accompagner pour nous aider une fois sur place à réaliser un trou à la tarière.

Je le retrouve au garage afin de charger moteur et autre... la journée commence. Le moteur de la tarière ne voulait pas démarrer.....après avoir effectuer de multiples tentatives, avoir noyer le moteur... ce n’était finalement qu'une bougie encrassée.

Le muskeg, l’engin du passé, repart de BIOMAR dans la clarté toute nouvelle de la journée. Nous sommes bien habillés et préparés à affronter quelques heures de froid. Aujourd’hui, il fait - 25°C avec quelques petites rafales de vent mais rien de bien méchant. Les doigts sont protégés, nous devons en prendre soin, ils sont nos atouts en cette journée. Sans eux, nous ne pourrions pas contrôler le ROV. Alors nous roulons .... Le muskeg s’arrête. Là comme ça. Justin d’un regard me signifie qu’il sait ce que c’est....



En deux, trois mouvements, il ouvre le muskeg, plonge les quatre fers en l’air dedans et après une minute ressort victorieux.... ce n’était qu’un câble électrique débranché !

Nous avons finalement réussi à arriver à bon port. Nous avons une demi-heure de retard sur le programme... rien de bien méchant.... tout retard est prévu ! Tout se déroule pour le mieux en ce début de manip, Justin repart, il est de petite Marie. Nous nous retrouvons tous les deux, Arnaud et moi, autour du trou noir, de temps en temps, nous apercevons le ROV, mais au bout d’une demi-heure, les doigts n’existent plus! Ils ont succombé au froid ambiant. Nous soufflons dessus.... les chaufferettes ne doivent chauffer que l’intérieur d’elles-mêmes et ne sont donc que peu efficaces. Rien à faire. Il faut tout laisser sur place et aller à l’abri. Direction le mât Iono et son shelter chauffé. Hum de la bonne chaleur ! Mais il va bien falloir retourner affronter le monde extérieur. Nous ne pouvons pas rester enfermer ici indéfiniment jusqu’à ce que les températures soient plus clémentes.

Il est 13 heures. Justin a fini et nous rejoint.


Le trou commence à être hanté. Après avoir mis quelques temps à faire un second trou, le vrai travail peut commencer.


Nous nous installons. Dans le trou fraîchement percé, il faut mettre un émetteur acoustique qui permet de se repérer dans l’espace une fois sous la banquise. Il doit être alimenté par une batterie....manque de pot avec le froid, les câbles deviennent solides et cassants. Un premier casse, aucun moyen sur place de le réparer. Et le deuxième suit le même chemin. Rien à faire. Le jour tombe. La nuit sera bientôt à nos portes. Et le trou qui aurait pu servir de puit de lumière pour se repérer ne sera bientôt qu’un trou béant et invisible.

Quelque part dans BIOMAR, une grosse lampe torche se cache. Je décide d’aller la chercher. Arnaud et Justin doivent rester sur place pour finir d’installer et surveiller le matériel. Mais une règle existe sur ce continent de glace, ne jamais être seul sur la banquise sous peine de sévisse de la part de la DISTA.

•La radio La radio pour Camille
•Oui Camille
•Me donnerais-tu l’autorisation d’aller du trou de pêche à BIOMAR en quad toute seule ?
•Ce n’est pas à moi de te la donner, demande plutôt à Marion

•Marion Marion pour Camille. As-tu entendu la conversation ?
•Camille, c’est Xavier. Marion est juste à côté.
•Me donne-t-elle son autorisation, s’il te plaît. S’il te plaît Marion....
•Veux-tu que je me mette à genoux devant Marion pour toi ?

•Si cela peut lui faire accepter, oui oui oui
•Après quelques réticences, elle accepte. Tu me remercieras
•Tout ce que tu voudras !

Avec une autorisation en main, j’enfile un casque et me prépare à partir ... le quad ne démarre pas. Justin essaye.... il n’a pas aimé le froid.... il a attrapé la crève et une baisse d’énergie.


Le quad n’a plus qu’une batterie à plat. Chouette !!! (Merci quand même Xavier!).

Alors Justin repart pour la deuxième fois de la journée et gravit la montagne. Nous le voyons parcourir les flans de l’île. Gambadant et glissant entre rochers et neige. Il est chargé de tout son attirail. Un pack batterie présent sur place fera office de source d’énergie. Justin, notre mécanicien de l’extrême !

Après tant d’émotions, le retour se fait rapidement.


Hum le bon chocolat chaud qui m’attend... Miam Miam Miam !

Alors vous me croyez maintenant ?

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