un parfum d'aventure, dans les eaux de l'antarctique

Je pars en Antarctique pour un peu plus d'un an, plus exactement en Terre Adélie, à Dumont d'Urville avec l'IPEV (Institut Paul Emile-Victor). Dumont d'Urville est une base de recherche polaire française, située en dessous de la Tasmanie. Mon rôle sera d'étudier les poissons et les organismes qui vivent sur le fond, en dessous de la banquise.

dimanche 30 janvier 2011

La passation

Quand nous arrivons sur l’île, des habitants sont déjà présents. Des personnes ont déjà vécu là un an dans le même environnement que celui où tu vas passer la prochaine année. Ils ont vécu des moments de joie, des moments difficiles comme toute personne en métropole. Ils ont vécu une année de leur vie sur la base. Quand tu arrives, tu remplaces quelqu’un. Tu vas remplacer quelqu’un qui a effectué le même travail que celui que tu vas effectuer. Ce n’est pas facile de laisser toute une année d’efforts à quelqu’un que tu ne connais ni d’Eve ni d’Adam. Alors tu expliques, tu montres des choses qui sont, pour toi, normales, naturelles, des choses que toi tu as intégré depuis longtemps. Et toi, moi, nous écoutons avec attention tous les conseils que nous pouvons recevoir. Les difficultés, les petites astuces. Tu découvres grâce à cette passation un peu la vie sur la base, de son rythme.

Quand je suis arrivée, j’ai appris à dépendre des gens. J’ai appris à déléguer mon travail. Tout ce que je faisais par moi-même en métropole, je l’ai délégué. Ici, chacun a son domaine. Je suis scientifique océanographe. Il est menuisier. Il est mécanicien de précision. Il est plombier. Il est électricien,..etc. Je dois percer des trous pour mettre des étagères, j’appelle le menuisier. Les aquariums fuient, j’appelle le plombier. Tu apprends à demander, à connaître les spécialités de chacun. Mais il est difficile de toujours dépendre des gens. Parfois tu as l’impression de perdre ton temps. Parfois tu aimerais pouvoir faire les choses par toi-même. J’ai eu parfois le sentiment de perdre toutes habilités manuelles. J’ai eu parfois le sentiment d’être inutile, de ne savoir rien faire. Mais j’ai appris. J’ai appris à aller voir les gens, à expliquer, à me renseigner, à déléguer.

Des journées, courant après Jean-Marc, le chef technique, pour demander des améliorations pour le SeaLab (le containeur de tri, celui où nous passons nous journées entières), pour des aquariums. Lui courant après, avec ma liste de course à la main, le tout noté sur un bout de papier. J’ai couru. J’ai rencontré les hivernants, les campagnards d’été et j’ai appris à la connaître.

En Antarctique, il faut apprendre à dépendre des gens. Il faut apprendre à vivre en communauté. La terre est hostile à notre présence et nous devons faire attention aux uns et aux autres. Nous sommes tous là pour venir en aide. Nous avons chacun nos spécialités.

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